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VIE DES ENTREPRISES

Interview
 
 
Lyndon Emsley , chef de projet du Centre Européen de RMN à très hauts champs


Activité : - centre de recherche en Résonance Magnétique Nucléaire multidisciplinaire (biologie, chimie, matériaux, santé, environnement)
- plate-forme d'accueil ouverte à la communauté nationale et internationale des utilisateurs de RMN
 
 
 

Le plan cancer a été fixée comme priorité nationale.

Avec la création en 2006 du Centre Européen de RMN à très hauts champs, l'agglomération lyonnaise avec l'appui de l'Etat et des collectivités locales disposera d'une ressource supplémentaire dans la lutte contre le cancer.

Ce centre devrait s'imposer rapidement comme un acteur de premier plan dans le domaine du diagnostic médical précoce.

Son aspect multidisciplinaire (biologie, matériaux, santé, environnement) lui confère, par ailleurs, une position unique en Europe.

Le centre Européen de RMN à très hauts champs devrait disposer du plus puissant spectromètre par RMN existant au monde, soit une puissance de 1 Giga Hertz. D'autres pays disposent dès à présent de RMN à 900 Méga Hertz. Pourquoi cette course mondiale à la puissance ?

Lyndon EMSLEY : La RMN (Résonance Magnétique Nucléaire) est une technique extrêment puissante pour déterminer la structure des molécules et obtenir des informations sur leur environnement. En utilisant les propriétés magnétiques des noyaux, elle permet de voyager au coeur de la matière et d'établir une cartographie des atomes constitutifs des molécules étudiées.

Cependant, cette cartographie peut se révéler difficile à interpréter. L'utilisation de champs magnétiques de plus en plus intenses permet d'améliorer la sensibilité et la résolution de ces appareils, autant de voies pour accéder à des systèmes plus complexes et à de nouveaux systèmes à l'échelle nanométrique.

Quelles sont les perspectives ouvertes par la RMN à très hauts champs ?

Lyndon EMSLEY : On constate que tout au long de l'histoire de la RMN, l'introduction de champs magnétiques de plus en plus intenses a permis de révéler de nombreux domaines d'application, parfois inattendus. Cette technologie a révolutionné la chimie de synthèse et la biologie structurale.

Elle apportera des développements importants en sciences de la vie, (diagnostic précoce des maladies, pour les cancers par exemple, découverte de nouveaux médicaments, caractérisation des voies métaboliques, ...), dans le domaine des matériaux (caractérisation de nano-structures, matériaux technologiques, création de biomatériaux, bio-senseurs,...), en environnement (micro-analyse,...).

Avec des perspectives aussi larges, on ne peut être étonné que plusieurs chercheurs travaillant dans le domaine de la RMN aient reçu ces dernières années le Prix Nobel.

Pour n'en citer qu'un, le suisse Kurt Wüthrich a été ainsi récompensé pour moitié du Prix Nobel de Chimie 2002 pour ses développements concernant l'identification de la structure tridimensionnelle des macromolécules en solution par RMN.

Ses recherches ont ouvert la voie de l'étude des protéines en solution, c'est-à-dire dans un milieu proche de leur environnement cellulaire.

Une avancée significative : Kurt Wüthrich a été ainsi en mesure de révéler pour la première fois la structure tridimensionnelle de la protéine appelée prion d'une souris, offrant de nouvelles perspectives dans la compréhension de la maladie de la vache folle.


Quels choix stratégiques ont été opéré pour positionner le Centre Européen de RMN à très hauts champs à l'échelle internationale ?

Lyndon EMSLEY : Trois choix stratégiques ont guidé la mise en place de ce projet.

Tout d'abord, ce grand instrument est financé dans le cadre du plan cancéropôle de l'agglomération lyonnaise avec un investissement de plus de 18 M € de la part de l'Etat, de la Région Rhône-Alpes, du Conseil Général et de la Communauté Urbaine de Lyon.
Un des objectifs de ce centre est de se positionner rapidement au premier plan dans le développement de nouvelles méthodes spectroscopiques et de calcul appliquée aux diagnostics médicaux, notamment dans le domaine du cancer. Ce centre sera ainsi un élément fort d'innovation thérapeutique, en mettant à disposition un outil d'amélioration des diagnostics médicaux faits aux patients sur la base d'analyses réalisées à grande échelle.

La pluridisciplinarité constitue le second choix.
Historiquement la plupart des centres de RMN dans le monde se sont construits pour des applications en biologie structurale. Deux centres à ma connaissance ont fait cependant le pari de la multidisciplinarité : Le Pacific Northwest National Laboratory et le National High-Magnetic Field Laboratory, tous deux basés aux Etats-Unis.
En Europe, le Centre Européen de RMN à très hauts champs sera le seul centre multidisciplinaire (biologie, chimie, matériaux, santé, environnement) à cette échelle.
A mon avis, cette polyvalence garantit l'adaptabilité de l'outil à de nouveaux domaines non explorés encore aujourd'hui. Ce centre réunira, par ailleurs, sous le même toit des équipes de recherche en RMN liquide et en RMN solide, deux secteurs clairement convergents.

Enfin, ce centre sera ouvert à l'ensemble de la communauté nationale et internationale des utilisateurs de la RMN, qu'il s'agisse de chimistes, de physiciens ou de biologistes. Nous visons à être reconnu dans ce cadre par l'Europe comme large scale facility. Ainsi les chercheurs européens pourront accéder encore plus facilement à notre plate-forme qui comprendra 6 RMN à très haut champs, allant de 500 Mhz à 1 Ghz.

Comment va se mettre en place concrètement ce projet ? Quelles sont les échéances ?

Lyndon EMSLEY : Ce centre verra le jour en 2006 à proximité immédiate du Domaine Scientifique de la Doua, où de nombreux laboratoires mènent des recherches dans ce domaine. Le CNRS est le maître d'ouvrage.

Sur le terrain où sera implanté le centre sont programmés aussi deux autres grands projets : la création de l'Institut des Sciences Analytiques, avec des fortes interactions prévues dans le domaine de l'environnement, et l'implantation du groupement de Lyon du Cemagref.

Par ailleurs, en février 2004, le 1er appareil du centre est arrivé à l'Ecole Normale Supérieure de Lyon : un RMN de 700 Mega Hertz, accessible dès à présent à la communauté des chercheurs français et européens.

 
(13/05/2004)
 
 
> Fiche d'identité du projet
 
> Centre Européen de RMN et CANCER
Centre Européen de RMN à très hauts champs

Lyndon EMSLEY
Chef de projet

Lyndon.Emsley@ens-lyon.fr


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Fax :
+33 4 72 72 84 83